D’une vaste langueur le temps sans fin se traîne
Insensible à l’ennui qui grisâtre m’entraîne
Vers l’abysse d’ébène où seul le moribond,
Irrémédiablement, tombe sans faire un bond…
Dans le gouffre béant, immobile, je plonge,
Amorphe mon esprit, poreux comme une éponge,
S’imbibe de l’alcool de l’indécision
Et tergiverse au bord de la dépression…
Vers le bas, une main me pousse et une autre
Me tire et le néant m’attire, je me vautre
Dans l’amer de mes pleurs et flotte entre deux eaux
Semblable à ce nuage au faîte des coteaux
Que la pente emprisonne et que le vent bouscule ;
Aphasique, mon cœur dans le vide bascule…
Seul m’obsède l’affreux remords aux doigts crochus,
Je l’entends ricaner : « Vois tes rêves déchus,
Allongés dans la tombe, ils sont à ton image ;
Larmoyants mollassons sans espoir ni courage. »
Que ne ferais-je, hélas ! Pour à ce point aimer,
Jusqu’à verser le sang heureux de m’abîmer,
Me fondre dans les bras d’un sanglant crépuscule
Où le ciel agonise et l’horizon recule !