J’ai suspendu le monde au vouloir de mon être,
Rien ne peut exister si je ne dis peut-être,
L’essence poétique, humaine abstraction
Est calligraphiée en simple impression…
Tout est originel dans la métamorphose
Car tout est là transcrit au cœur de chaque chose
Libre de tout symbole et ancien préjugé
Acquis, seul l’inné donne effigie au projet…
Dans l’attente d’un mot l’horizon me regarde
Et titube indécis vers la nuit par mégarde,
Enténébrant ses yeux dans un miroir sans tain ;
J’en estompe la lèvre effilée au lointain…
J’ai peint le ciel d’un noir si profond que le vide
Lui-même disparaît, nulle clarté livide
Ne vient dilapider l’ample conception
Assujettie au pouvoir de l’inspiration…
Puisque ma vision commande l’apparence,
Je bâtis mon poème absous d’interférence,
Ce n’est pas le ciel qui me dit ce qu’il est : mais
Moi qui le ressuscite autrement désormais…
J’en façonne le corps d’un ruisseau d’encre agile,
Cent fois, sur le métier, j’en malaxe l’argile
Puis de le baptiser, bravant l’éternité,
J’en féconde l’œuf d’un verbe inusité…
Il me reste à donner une forme, un visage,
Une nature inédite à l’obscur paysage,
De ce que j’imagine esquisser les contours
Et, fil à fil, l’orner de mes plus beaux atours…