Le souffle de mon cœur, comme une guêpe prise
Au piège d’une cage en verre dépoli,
Bat des ailes en vain, bourdonne et puis s’épuise :
Ta porte reste close et l’horizon pâlit…
Sur le bord d’un trottoir, je retourne ma poche.
Avec soin conservé sous un mouchoir froissé,
Ramassé dans la rue, un objet plutôt moche,
Alambiqué, sans doute un vieux ressort cassé,
Comme mon cœur, rouillé. Pas plus gros qu’un poix-chiche,
Un morceau de métal que personne ne veut
Ni voir ni posséder, devenu mon fétiche,
Lorsque le ciel est gris je lui confie un vœu…
Négligeable et commun, un peu à mon image,
Invisible à vos yeux, vagabond sans le sou,
Tout juste toléré, c’est dans le paysage
Un petit rien perdu qui ne vaut pas un clou
Raflé je ne sais où. Seulement une chose
Avec qui je converse et délire la nuit
Quand l’envie est trop forte et mon âme morose,
Quand l’instant se suspend aux branches de l’ennui,
Quand je vais, au hasard, me perdre, solitaire
Dans la ville et surtout, pour ne pas sangloter,
Qu’il me faut, à quelqu’un parler, ne plus me taire
Replié sur moi-même en proie à l’anxiété.
Quand mon attente est vaine et la vie incertaine,
Quand la douleur revient nourrir le sentiment ;
C’est comme une présence à qui dire « je t’aime !... »
Un ami dont j’ai fait mon dernier confident…
Accrochée à mes pas, nébuleuse compagne,
Les jours ont beau passer, fidèle à mon émoi,
Le temps est immuable et sa main m’accompagne,
Solitude m’exile au plus profond de moi…