Dans la douce clarté de la nuit hésitante,
Fils d’encre griffonnés d’une main frémissante,
J’imagine ses doigts, délicats, aériens,
Tapoter le clavier, tracer des petits riens…
Intimiste reflet dans les yeux d’une femme,
Eclos l’heure magique où s’épanche son âme,
Elle promène son cœur en de secrets jardins
Et regarde passer de tendres baladins…
Sous le pont des soupirs les gondoles sommeillent,
Il suffit d’une image et ses sens s’émerveillent,
Parfumés de moka, les jours de carnaval,
Des effluves de rose embaument le canal…
Quand la lune se voile en robe de tzigane,
Elle pense à Venise et devient courtisane,
Masque de velours noir et profond décolleté,
Vers le bal, elle court sur le quai déserté…
La fête terminée, amante libertine,
Ce soir comme naguère éminemment câline,
Dans un sofa moelleux à large baldaquin,
Elle oubliera le temps dans les bras d’Arlequin…
Un violon sanglote un vieil air de bohème,
Seulement quelques mots, une lettre, un poème,
Eldorado lointain, d’une ride sur l’eau
C’est le rêve qui flâne, étrange, à fleur de peau…